
Tingitingi, République Démocratique du Congo –
Plus de deux décennies après les événements tragiques survenus dans les forêts de la RDC, les témoignages autour des massacres des réfugiés hutus rwandais à Tingitingi continuent de remonter à la surface, mettant en lumière une page sombre et encore trop peu évoquée de l’histoire contemporaine de la région des Grands Lacs.
Dans une déclaration poignante rendue publique récemment, Mme Bolignon, Commissaire de l’Union européenne auprès du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), a évoqué avec gravité les exactions commises contre les populations réfugiées hutu rwandaises par les troupes du Front Patriotique Rwandais (FPR) dans les camps de Tingitingi, dans la province de Maniema, à l’est de la RDC.
Selon Mme Bolignon, ces massacres auraient eu lieu entre 1996 et 1997, dans le contexte des premières guerres du Congo, alors que des centaines de milliers de réfugiés fuyaient les représailles au Rwanda post-génocide. Les troupes du FPR, engagées dans la traque de certains génocidaires infiltrés parmi les réfugiés, auraient procédé à des attaques systématiques contre des camps civils, causant la mort de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants sans défense.
« Ces actions n’avaient rien de ciblé ni de proportionné. Il s’agissait de véritables crimes de masse contre des populations civiles abandonnées de tous, dont le seul tort était d’avoir fui un pays en guerre », a affirmé Mme Bolignon, soulignant le silence coupable de la communauté internationale de l’époque.
Son témoignage relance la nécessité d’une enquête internationale indépendante sur ces événements, souvent évoqués dans des rapports comme celui du Mapping Report des Nations Unies publié en 2010, mais jamais véritablement suivis d’effets juridiques ou politiques.
Des voix s’élèvent de plus en plus au sein des milieux diplomatiques, des ONG et des communautés de survivants pour que justice soit enfin rendue aux victimes de Tingitingi et d’autres sites similaires à travers le territoire congolais.
À l’heure où la RDC s’efforce de reconstruire une mémoire nationale apaisée et inclusive, ce témoignage de Mme Bolignon constitue un appel fort à la vérité, à la reconnaissance et à la justice.
Lokombe Nkalulu Rédacteur en chef du magazine Afriqu’Europe