
La récente rencontre entre Xavier Bettel, ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et du Commerce extérieur, et Olivier J.P. Nduhungirehe, ministre rwandais des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, soulève de nombreuses interrogations. Alors que cette collaboration est présentée comme un renforcement des liens diplomatiques et économiques, elle ne manque pas de susciter la controverse, notamment en raison du rôle du Rwanda dans les conflits en Afrique centrale.
Un partenariat économique sous fond d’ombre géopolitique
Officiellement, le Luxembourg et le Rwanda cherchent à approfondir leur coopération dans divers domaines, notamment le commerce, l’innovation et le développement. Cependant, derrière ces accords se cache une réalité plus complexe : le Rwanda est régulièrement accusé de déstabilisation dans la région des Grands Lacs, notamment en République Démocratique du Congo (RDC), où Kigali soutient activement le groupe rebelle M23, responsable de nombreuses exactions.
Malgré ces accusations documentées par des rapports de l’ONU et dénoncées par plusieurs gouvernements, le Rwanda continue d’entretenir des relations privilégiées avec des puissances européennes comme le Luxembourg. Pourquoi un pays comme le Luxembourg, souvent perçu comme un modèle de transparence et d’éthique diplomatique, ferme-t-il les yeux sur les pratiques controversées de Kigali ?
Un agenda caché derrière la coopération ?
L’Europe, à travers ses relations bilatérales, semble adopter une posture ambiguë vis-à-vis du Rwanda. D’un côté, elle critique les ingérences rwandaises en RDC, mais de l’autre, elle signe des accords économiques et diplomatiques avec le régime de Paul Kagame. Le Luxembourg, en tant que centre financier international, pourrait-il jouer un rôle dans le blanchiment des ressources pillées en RDC via des canaux officiels ?
La question mérite d’être posée, d’autant plus que le Rwanda a su se positionner comme un partenaire stratégique pour plusieurs pays occidentaux, notamment dans le domaine des nouvelles technologies et des services financiers. Cette proximité entre Kigali et certaines capitales européennes met en lumière une géopolitique à deux vitesses, où les intérêts économiques priment sur les considérations humanitaires et sécuritaires.
Un silence complice ?
Les Congolais, victimes des conflits à l’Est de leur pays, s’interrogent : comment un pays comme le Luxembourg peut-il justifier une coopération renforcée avec un régime qui alimente la guerre en RDC ? Si l’Europe souhaite réellement jouer un rôle constructif en Afrique, elle doit cesser de soutenir, directement ou indirectement, des États qui participent à l’instabilité régionale.
Ce rapprochement entre le Luxembourg et le Rwanda prouve une fois de plus que la realpolitik l’emporte souvent sur les principes démocratiques et éthiques. Une question demeure : jusqu’à quand l’Europe continuera-t-elle à fermer les yeux sur le rôle du Rwanda dans les conflits africains ?
Lokombe Nkalulu
Rédacteur en chef du magazine Afriqu’Europe